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La protection de l'enfance doit désormais gérer en interne 24h/24 ses enfants handicapés


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Avec le Covid-19, les établissements d'accueil des enfants handicapés ferment. Les enfants relevant de la protection de l'enfance qui y étaient accueillis à la journée ou en internat partagé ont réintégré leur foyer à temps plein.
Information mise à jour : la fiche Covid-19 sur la protection de l'enfance, diffusée le 19 mars et à télécharger ci-dessous, précise que "des liens avec les établissements sociaux et médico-sociaux environnants" (et notamment des établissements pour enfants handicapés fermés) pourront permettre aux établissements de protection de l'enfance "de trouver des ressources". Cet éventuel redéploiement sera piloté par les conseils départementaux en lien avec les services de l’État. 
 
À quelques exceptions près, les établissements d'accueil des enfants handicapés ont fermé. Les enfants relevant de la protection de l'enfance qui y étaient accueillis à la journée ou en internat partagé ont réintégré les foyers de protection de l'enfance et autres maisons d'enfants à caractère social (Mecs) à temps plein. Un vrai casse-tête en matière de ressources humaines pour les gestionnaires alors même que le personnel de ces établissements n'est pas, pour l'instant, jugé prioritaire pour recourir au sytème de garde d'enfants dédié au personnel sanitaire et médico-social.

"Avec la gestion de la crise du coronavirus, la position la plus complexe à tenir est sans aucun doute celle de directeur de Mecs", explique à Hospimedia Olivier Baron, directeur de l'Association laïque pour l'éducation, la formation, la prévention et l'autonomie (Alefpa) qui gère des établissements sanitaires, médico-sociaux et sociaux. La Mecs est le domicile de tous les enfants placés, qu'ils aillent à l'école ou qu'ils aient un suivi spécialisé. Ils y sont désormais confinés en permanence.

Plus de travail, moins de moyens

"Nous devons gérer cette situation sans moyens supplémentaires, avec un absentéisme qui frise les 40%
 dans certains établissements. Une situation d'autant plus complexe que le social n'est pas jugé prioritaire ni pour la garde d'enfants, sauf dans certains départements comme les Hauts-de-Seine ou le Lot-et-Garonne. Tout comme elle ne l'est pas pour la gestion des masques et des gants alors que nous devons gérer à l'isolement dans nos établissement des suspicions de Covid-19. Nos établissements du secteur enfance en gèrent une dizaine actuellement. Le sont-ils réellement ? Nous ne le savons pas puisqu'ils ne sont pas non plus jugés prioritaires pour le dépistage", poursuit Olivier Baron.

Les gestionnaires ont donc un énorme travail de réassurance à mener auprès de leurs équipes, ne serait-ce que pour éviter les droits de retrait. Les opérateurs qui gèrent sur les mêmes zones géographiques des Mecs et des instituts médico-éducatifs
 (IME) ou des instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (Itep) peuvent basculer une partie du personnel handicap vers les Mecs mais cette situation est loin d'être majoritaire. Même l'Apajh reconnaît qu'elle a dû embaucher en urgence des éducateurs dans certaines Mecs pour accompagner les jeunes en journée. Lors d'une téléconférence de presse le 17 mars, le Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux (Gepso) a demandé l'intégration des personnels sociaux dans les publics prioritaires en matière de garde d'enfant et l'organisation par les ARS et les départements de solutions territoriales de remplacements pour les foyers de l'enfance.

La garde d'enfants, une priorité

"La protection de l'enfance est une prérogative des départements, nous n'y bénéficions pas de directives nationales aussi claire que dans le handicap", explique Jean-Pierre Stellittano, vice-président du Gepso. Le Gepso loue la bonne volonté d'Adrien Tacquet, secrétaire d'État en charge de la Protection de l'enfance. "Mais son appel aux animateurs et jeunes retraités volontaires qui pourraient nous prêter main forte est difficilement audible dans un contexte de mesures de confinement. Nous souhaitons que les ARS et les départements puissent gérer la mise à disposition de ces volontaires ainsi que des professionnels du secteur de l'enfance handicapée qui pourraient nous être d'un grand secours car 30% de nos jeunes sont en situation de handicap", poursuit
Jean-Pierre Stellittano. Pas sûr que cette dernière proposition fasse l'unanimité du côté des gestionnaires car nombre d'entre eux mobilisent déjà leurs équipes sur la continuité des accompagnements à domicile et en renfort sur les internats confinés (lire notre article).

Pour François Delacourt, président de l
'Association des instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (Itep) et de leurs réseaux (Aire), avec le confinement certaines situations pourront devenir explosives dans les Mecs mais aussi à domicile avec des jeunes qui ont besoin de se défouler. "Nous allons travailler à assurer la continuité des accompagnements auprès de tous les jeunes quelque soit leur lieu de résidence. Chacun cherche des solutions et comme je suis optimiste, je pense qu'on va même inventer de nouvelles formes d'accompagnement. Il est essentiel de ne pas rompre le travail éducatif engagé."

Ne pas les abandonner

Directeur de la mutuelle la Mayotte, François Delacourt gère par ailleurs un dispositif expérimental, baptisé Anna Arendt à Montlignon (Val d'Oise) qui accueille exclusivement des jeunes en situation de handicap relevant de l'aide sociale. "Un quart des salariés de cet internat n'est plus disponible aujourd'hui mais j'ai pu compter sur la solidarité de ceux des instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques et instituts médico-éducatifs pour garantir la continuité du service. La principale angoisse des jeunes ce n'est pas le coronavirus, c'est que nous puissions les abandonner", explique-t-il.

Pour Jean-Christophe Cavan, directeur territorial de l'Alefpa en Vendée, le confinement n'est pas une question facile. Il a ouvert un dispositif expérimental d'hébergement permanent pour des jeunes "incasables" cumulant handicap problèmes familiaux, voire judiciaires. "Ce sont des jeunes écorchés vifs, qui ont cumulé dans leur vie les abandons. Nous sommes déjà heureux d'avoir pu maintenir dans les conditions actuelles l'hébergement séquentiel en pédopsychiatre pour ceux qui en ont besoin", explique-t-il. Dans cette structure originale, huit jeunes de 16 à 18 ans vivent dans des appartements autonomes avec un encadrement éducatif. "Ils ont compris le confinement mais de là à le supporter pendant des semaines... Je ne garantis pas qu'on n'en verra pas revenir entre deux policiers", précise-t-il. Pour tenir sur le long terme avec cette structure hors norme, Jean-Claude Cavan a d'ores et déjà prévu de mixer cette équipe avec celle de l'Itep afin de conserver en permanence une partie de l'équipe originale pour éviter de voir tout le fragile travail éducatif voler en éclat.

Emmanuelle Deleplace

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