La fusion et le rachat d'entreprises ne s'improvisent pas. Dans le secteur médico-social, le phénomène touche aussi bien les grands groupes que des entreprises individuelles. Intervenant à l'Agora Grand âge et Handicap des Salons de la santé et de l'autonomie, deux juristes ont présenté mardi 20 mai leur vision des fusions."En France une fusion d'entreprises sur deux échoue", a témoigné mardi 20 mai Sophie De Senilhes, avocat associé du cabinet Carakters, à l'Agora Grand âge et Handicap des Salons de la santé et de l'autonomie. Pour elle, ce constat serait principalement le résultat d'une mauvaise anticipation en amont et aussi d'une réorganisation négligée des équipes dans la phase opérationnelle de la démarche. À l'heure où le secteur médico-social multiplie les fusions et acquisitions, cela pourrait être inquiétant si l'échec n'était pas évitable.
Un choc des cultures
Aux côtés de Sophie de Senilhes, son associée Solenne Roche-Brugère a poursuivi en évoquant les motifs des fusions-acquisitions. Soulignant tout particulièrement que, dans le secteur médico-social, elles concernent toutes les structures aussi bien les grands groupes - comme récemment Korian et Medica - que les petits établissements. Dans ces deux situations, les enjeux humains - et tout particulièrement le choc des cultures d'entreprises - est souvent une pierre d'achoppement, a-t-elle reconnu. Dans le secteur privé lucratif, une stratégie de croissance - comme la volonté de pénétrer à l'international un marché réglementé - peut-être l'élément déclencheur d'une fusion. Pour les établissements plus modestes, celle-ci peut se faire après l'annonce d'arrêt d'activité d'un propriétaire ou permettre à un ou plusieurs petits établissements d'atteindre une taille critique pour réaliser des investissements nécessaires. La réglementation est souvent à l'origine d'un rapprochement. Dans tous les cas, "une vision stratégique en amont est nécessaire", a insisté Sophie de Senilhes.
Des mauvaises raisons pour fusionner
Il y a aussi, selon elle, de mauvaises raisons pour fusionner. Il est par exemple primordial que l'établissement et le groupe médico-social qui s'engagent dans une telle opération n'affichent "pas comme un but en soi la recherche de croissance" mais qu'ils se fixent un objectif de croissance pour "créer de la valeur et proposer de nouveaux services". Sophie de Senilhes considère également comme de mauvaises raisons le fait d'engager une fusion pour dissimuler une activité déficitaire.
Une opération salutaire
Côté avantages, le principal est le fait que les fusions permettent de redistribuer les cartes sur un territoire sans passer par le système de l'appel d'offres (dans la mesure où elles ne modifient pas le nombre de lits). Toutefois cela ne signifie pas pour autant que les opérateurs ne sont pas soumis aux contraintes réglementaires. Avant de reprendre ou de procéder à une fusion, il est donc important de vérifier les autorisations et de faire un audit des évaluations interne et externe, conseille Solenne Roche-Brugère. Si l'établissement appartient à un Groupement de coopération sanitaire (GCS), il faudra au préalable demander l'agrément de l'administrateur pour maintenir l'adhésion de l'établissement. Pour un retrait du GCS, l'établissement devra se retirer du groupement avant son rachat ou fusion. Entre identification du marché, de la structure et l'état des lieux des synergies... le travail à réaliser en amont de l'opération peut prendre, selon Solenne Roche-Brugère, entre six mois et un an.