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Ressources humaines

Les DRH sont invités à stopper leur "bashing" du statut de la fonction publique hospitalière

Le statut de la FPH, qui fête cette année ses 30 ans, est loin d'être aussi encroûté que certains hospitaliers se plaisent à le laisser penser. Ce 10 mai au colloque de l'Adrhess, les débats ont vite démontré que la plasticité du statut permettait pleinement de répondre aux exigences d'efficience médico-économique.

Ce 10 mai à l'occasion de son colloque annuel, l'Association pour le développement des ressources humaines des établissements sanitaires et sociaux (Adrhess) a célébré en grande pompe dans l'enceinte même du ministère des Affaires sociales et de la Santé les trente ans de la fonction publique hospitalière (FPH). Le dernier né des trois versants de la fonction publique a en effet soufflé ses trente bougies le 9 janvier (lire ci-contre). Dans un mélange d'"incertitudes" et d'"inquiétudes" nées des contraintes du plan triennal d'économies et des bouleversements cartographiques à venir via les groupements hospitaliers de territoire (GHT), la FPH a-t-elle aujourd'hui atteint "l'âge de la maturité" ?, pour reprendre l'interrogation posée d'emblée par le président de l'Adrhess, Jean-Marie Barbot. À cette question, une chose est sûre pour l'intéressé : il existe actuellement une volonté forte des hospitaliers de la "réinventer" et de transformer sa gestion des ressources humaines (GRH). Et le directeur d'hôpital se veut optimiste. Au vu de sa capacité d'adaptation passée (création d'un répertoire des métiers, adaptation à la T2A, déconcentration de la GRH au sein des pôles, annualisation du temps de travail, évolution paritaire de l'encadrement supérieur…), "elle saura s'adapter à la nouvelle donne territoriale" qui s'annonce. Dès lors toutefois qu'"une politique RH de territoire" voit réellement le jour, comme le plaide l'Adrhess dans son mémorandum dévoilé le 5 mai.

"Un puissant amortisseur social"

Car, comme l'a fait remarquer plus d'un intervenant, si la dynamique d'innovation se doit d'être permanente dans la fonction publique, qui plus est l'Hospitalière, pas question pour autant de pousser jusqu'au "big bang" et sortir du modèle statutaire actuel. La "plasticité" du statut de la fonction publique est au contraire "une réponse au développement d'une RH qualitative", a insisté Nicolas de Saussure, chef du service du pilotage et des politiques transversales à la Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP). "La rigidité dans le privé des conventions collectives n'a rien à envier à celle réelle ou supposée de nos statuts", a déjà soutenu quelques minutes plus tôt Jean-Marie Barbot. Quant à l'ancien ministre et secrétaire d'État communiste Anicet Le Pors, à l'œuvre en 1983 lors de la création du statut général des fonctionnaires, il a lui aussi appelé les hospitaliers à "ne pas singer le privé". Dans une verve percutante du haut de ses quatre-vingt-cinq ans, il n'a pas caché qu'il est pour le moins "fâcheux" de voir le secteur public copier la gestion RH aujourd'hui à l'œuvre dans le privé. "La fonction publique est beaucoup plus multidimensionnelle qu'une entreprise privée, aussi grande soit-elle. On manque au service public en ne faisant pas d'effort et en copiant ce qui brille le plus aujourd'hui ! Cela dispense les DRH hospitaliers d'avoir une réflexion sur l'efficacité sociale de la fonction publique", a asséné l'ancien politique. Or cette efficacité sociale, notamment à l'hôpital, est bien réelle, à l'entendre, "un service public étendu" se révélant "un puissant amortisseur social".

La FHF s'apprête à lancer un baromètre RH

Intervenant à mi-journée du colloque de l'Adrhess, le délégué général de la FHF, David Gruson, a annoncé le lancement par la fédération d'un baromètre RH. Celui-ci sera adressé prochainement à l'ensemble des établissements publics de santé et médico-sociaux avec pour objectif de "mieux piloter le changement", notamment dans l'optique des futurs GHT. Au passage, le dirigeant hospitalier a une nouvelle fois plaidé pour une compensation financière des récentes évolutions statutaires accordées aux fonctionnaires, de même que le développement du vote numérique ou encore l'évaluation professionnelle en lieu et place de l'historique notation.

"Le statut n'empêche pas de mener une vraie GRH"

"Il est rare que les DRH fassent l'apologie de la loi de 1986", abonde Yann Dubois, lui-même ancien DRH hospitalier et désormais enseignant à l'École des hautes études en santé publique (EHESP). Mais cela s'apparente surtout à du "statut bashing". Certes, il existe "un certain nombre de lourdeurs". Pour autant, le statut de la FPH propose "une structure et un contenu qui offrent des marges de manœuvre et ne sont pas forcément antinomiques de l'efficience médico-économique". La loi de 1986 est donc "très loin d'un texte sans vie", dixit l'intéressé, avec environ deux modifications par an depuis 1986. Le statut paraît "de moins en moins en situation de "splendide isolement"*. Il s'ouvre, se rapproche voire partage des règles communes avec le privé." Pour le directeur, cette "évolution salutaire" améliore "l'opérationnalité des textes et la souplesse de leur gestion" sans remettre en cause les fondamentaux. Cela n'empêche pas Yann Dubois d'admettre que certains points sont "totalement dépassés". Et de lister ses attentes : simplifier les règles de recrutement par concours, toiletter le régime indemnitaire… "Mais cela n'empêche pas de mener une vraie GRH." Pour preuve, l'extrême hétérogénéité observée entre les établissements atteste, selon lui, qu'il existe bien sur le terrain de profondes marges d'action dès lors que certains principes sont respectés : l'autonomie de gestion pour le chef d'établissement, la spécificité de la FPH (intérim, concurrence du privé), le respect des valeurs… Pour l'enseignant, cela va sans dire : le statut est "beaucoup plus malléable" que certains ne veulent le faire croire.

Rendre "probatoire" le stage pour une "flexisécurité à la française"

Avant toute titularisation sous le statut de la FPH, le stage devrait devenir "probatoire", estime Yann Dubois. L'enseignant de l'EHESP déplore en effet qu'il y ait trop peu de refus de titularisation après une première stagiairisation voire de prolongations de stage. Or cela ne doit pas être perçu comme une sanction, à l'entendre. L'idée serait donc d'opérer "un parcours très exigeant" pour s'assurer d'un très haut niveau de compétence et pouvoir ensuite prétendre à l'emploi à vie qu'accorde la statut. En somme, des contrats à durée déterminée dans plusieurs services sur deux ans maximum, puis une mise en stage (avec possibilité d'être prolongée) et enfin une éventuelle titularisation. Une sorte de "flexisécurité à la française", résume l'intéressé. Cela permettrait de restreindre les contractuels aux seuls remplacements ponctuels (congés ou arrêts maladie pour continuité du service public). Ils ne seraient donc plus détournés de leur vocation première, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, qui les voit occuper des postes permanents afin de réduire la masse salariale et satisfaire les tutelles.

Thomas Quéguiner

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