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Dialogue social

Le médico-social souligne "l'urgence de refonder en profondeur" le modèle des Ehpad et du domicile

Tout aussi remontés mais sensiblement moins mobilisés sur cette deuxième journée de grève nationale, syndicats et fédérations sont revenus sur les grands enjeux d'évolution du secteur Ehpad et domicile. De la remise à plat des professions et de la tarification en passant par un observatoire d'analyse d'impact... tour d'horizon des propositions.22,5%. Tel était, selon les chiffres de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), le taux de mobilisation des personnels d'Ehpad, grévistes déclarés et personnels assignés, à l'occasion de la seconde journée de grève nationale ce 15 mars. 5,7% si l'on compte les seuls grévistes déclarés. Moins important qu'au 30 janvier, où la mobilisation atteignait 31,8% (lire notre article), le chiffre n'en atténue pas moins le ras-le-bol général quant à la politique — ou l'absence de politique, selon le point de vue — de prise en charge des personnes âgées.

Alors que les syndicats sont ressortis de leur entrevue au ministère avec l'assurance de l'"écoute" et de la "compréhension" de la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn quant aux problématiques du secteur, aucune nouvelle certitude concrète quant aux mesures implémentées n'a été dégagée. Le secteur rappelle pourtant l'urgence à agir. Dans un communiqué du 14 mars, l'Uniopss rappelait ainsi, au-delà de la préfiguration annoncée sur la prise en charge des personnes âgées, "l'urgente nécessité de refonder en profondeur le modèle actuel des Ehpad et de l'aide à domicile". L'instauration d'une "politique publique ambitieuse", en somme, pour laquelle les fédérations se disent prêtes à s'associer. Avec un point de vigilance, souligné par l'Uniopss et l'Association française des aidants : assurer un reste à charge "supportable" aux familles.

Gériatrie, "discipline concernée au plus profond d'elle-même"

Alors que les organisations syndicales appellent à la revalorisation des carrières et des salaires, ainsi qu'à l'amélioration des conditions de travail et d'accompagnement par l'augmentation du taux d'encadrement — plébiscitée par les députées Monique Iborra et Caroline Fiat et boudée par Agnès Buzyn (lire nos articles ici et ) —, la Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG) a, quant à elle, pris position pour défendre un métier en crise, abîmé par le manque de compétences gériatriques et gérontologiques et la faiblesse des efforts déployés pour la formation des professionnels. Aux côtés du Collège national professionnel de gériatrie (CNP) et du Collège national des enseignants en gériatrie (Cneg), la société savante a ainsi insisté : "À travers la gronde des personnels soignants [...] c'est bien notre discipline qui est concernée au plus profond d'elle-même."

Même constat du côté des employeurs associatifs, Adessadomicile, ADMR, Fnaafp-CSF et Una. Tous confirment qu'il est "urgent d'améliorer les conditions de travail de celles et ceux qui apportent soin et accompagnement aux plus fragiles", tout en rappelant la difficulté du recrutement face à des besoins criants. "5 000 postes sont à pourvoir immédiatement partout en France et plus de 160 000 emplois devront être créés dans les quatre ans à venir", ont-ils ainsi rappelé.

Un observatoire sur l'impact de la réforme

La remise à plat du système ne pourra bien entendu pas économiser une réflexion sur le financement de la prise en charge des personnes âgées. À défaut de la création d'un cinquième risque, encore et toujours appelé des vœux du secteur, les regards se tournent pour l'heure sur les altérations annoncées concernant la réforme de la tarification, et plus spécifiquement la convergence. Prévue pour être suspendue le temps de trouver un mécanisme à même de neutraliser ses effets négatifs, celle-ci, précise par anticipation la Fehap, "ne devra pas se faire au détriment des autres établissements". Un constat partagé par le Syncass-CFDT, ou encore le Synerpa et l'Uncass, qui ont respectivement appelé par communiqué pour le syndicat, et lors d'une table ronde devant la presse en mars dernier, à l'instauration d'un clapet anti-retour. Une proposition qui s'accompagne, pour le Syncass-CFDT, de l'accélération de "l'atteinte cible du forfait soins pour tous les établissements" sous deux ans.

Saluant de son côté la prise de conscience des pouvoirs publics, la FHF, qui rappelle au passage avoir alerté le Gouvernement il y a plus d'un an en la matière, fait elle aussi savoir sa vigilance. Et annonce la mise en place d'un observatoire pour assurer "la remontée réelle des situations de tension" et "étudier les impacts de la réforme". D'après les chiffres provisoires avancés par la ministre, 20 à 25% des établissements sortent avec une recette globalement réduite du fait de la réforme.

Convergence, et sur le terrain ?

D'après la première enquête de terrain menée par la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), l'intervention du mécanisme de convergence tarifaire sur les sections soins et dépendance s'est traduite sur le terrain par des pertes sèches estimées à 210,2 millions d'euros (M€) pour les établissements "surdotés", dont 144,6 M€ pour le public, 56 M€ pour le privé non lucratif et 9,6 M€ pour le privé commercial (lire notre article). Interrogée sur la question à l'occasion de la présentation des résultats financiers de son groupe, Sophie Boissard, directrice générale de Korian, a souligné la perspective d'augmentation de l'enveloppe soins pour de nombreux établissements actuellement en rénégociation de leurs contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom), avec une augmentation de 50 à 100 points sur le Gir moyen pondéré (GMP), jusqu'alors "très en retrait". Quant à l'enveloppe dépendance, le constat est sans appel : "La diminution du point départemental remet le système de dotation plus bas qu'il ne devrait l'être." Un "point de fragilité sur lequel les pouvoirs publics doivent travailler", a-t-elle estimé.

Agathe Moret

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