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Les aidants familiaux deviennent les héros de la journée mondiale de l'autisme 2020

La journée mondiale de l'autisme consacre, du fait du confinement, le rôle des aidants familiaux. Héroïnes malgré elles, les familles deviennent les premières et quasiment les seules bénéficiaires des suivis à distance mis en place. Le président de la République annonce un assouplissement des règles de sortie pour leur faciliter la tâche.
En confinement, les parents doivent jouer tous les rôles : éducateurs, rééducateurs...
En confinement, les parents doivent jouer tous les rôles : éducateurs, rééducateurs...

Le thème de la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme 2020 devait être la transition vers l'âge adulte. Pandémie de Covid-19 oblige, elle se transforme en autisme et confinement. Même si certaines situations sont tendues, les professionnels — rejoints par le président de la République en personne — tirent un grand coup de chapeau aux aidants familiaux qui assument aujourd'hui tous les rôles avec patience et imagination. Mais le télé-accompagnement pourra-t-il suffire sur la durée ?

Un relai plutôt bien passé

Deux semaines après le début du confinement les professionnels sont plutôt rassurés sur le suivi à distance des personnes avec autisme. "Je constate une mobilisation extraordinaire des professionnels et des familles. Ils ont réussi à déployer collectivement des ressources et des modes de communication qui ont, dans l'ensemble, permis de soutenir et structurer la vie des enfants et adultes avec autisme. Mais il faut bien reconnaître que pour l'instant nous sommes dans une temporalité sans accompagnement en présentiel connue, par exemple en période de vacances scolaires. Ce modus videndi va-t-il pouvoir continuer sur un temps plus long ? Nous l'ignorons", explique à Hospimedia le Pr Frédérique Bonnet-Brilhault, responsable du service de pédopsychiatrie du CHU de Tours (Indre-et-Loire) et du centre régional autisme (Cra) Centre-Val de Loire.

Un avis partagé par Martine Pirat-Cramet, directrice de la plateforme d'accompagnement intégré de l'Apajh dans l'Ain. "Notre institut médico-éducatif (IME) a fermé et son équipe, comme celle du service d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad), de l'équipe mobile qui suit des adultes ou du pôle de compétences et de prestations externalisées (PCPE) continuent les accompagnements majoritairement à distance. Nous avions un site Internet privé d'échange entre les familles et les professionnels. Il est dix fois plus actif aujourd'hui et alimenté à parts égales par les professionnels et les familles alors que, jusqu'à présent, seuls les professionnels l'enrichissaient. Chaque personne suivie à un référent qui prend contact selon les modalités définies avec la famille. Pour les situations les plus complexes, nous continuons des suivis à domicile."

Aide à distance pour les professionnels aussi

Au CHU de Tours, les interventions à domicile ont été maintenues si nécessaire et le service de pédopsychiatrie a réorganisé, avec l'aide des infirmières hygiénistes, un circuit pour maintenir des prises en charge externalisées à la demi-journée pour les enfants qui en ont besoin. Le Cra
Centre-Val de Loire a ouvert deux lignes téléphoniques, l'une dédiée aux usagers et l'autre aux professionnels. "Nous avons eu des demandes des professionnels sur l'organisation de cellules psychologique ou la mise en place des protocoles de confinement pour les établissements médico-sociaux", précise le Pr Bonnet-Brilhault.

"Il a pu y avoir des incompréhensions au départ sur la notion de continuité des accompagnements, estime de son côté Sophie Biette, vice-présidente et référente autisme de l'Unapei, car à distance ce ne sont pas les enfants ou adultes autistes mais les familles que nous accompagnons. Aujourd'hui les retours que nous avons sont plutôt bons. Évidemment la charge est lourde et certaines familles sont épuisées mais elles apprécient aussi que les professionnels partagent leurs techniques et leur savoir-faire. Nous avons de nombreux retours de parents qui nous disent qu'ils ont appris des modes de fonctionnement qu'ils pourront conserver pour l'après-crise".

La grande misère de l'aide à domicile

Pour Danièle Langloys, présidente d'Autisme France, les familles héroïques sont quand même largement livrées à elle-même
 : "L'aide à domicile n'a pas été assez pensée, c'est la grande misère. Les familles qui bénéficiaient d'un suivi médico-social ont gardé un petit lien à distance quand les professionnels référents n'ont pas été réquisitionnés pour faire fonctionner les internats. Peu d'entre elles bénéficient d'un soutien à domicile, soit parce que les équipes ne disposent pas des équipements de protection suffisants, soit parce que les familles ont peur de faire entrer ces professionnels potentiellement vecteurs d'infection. Les enfants en inclusion scolaire sans l'aide du secteur médico-social sont complètement largués sans le soutien de leurs accompagnants d'élève en situation de handicap (AESH)".

Adapter les autorisations de sortie

Avec le matériel de protection qui commence à arriver, l'Unapei espère pouvoir redéployer des équipes à domicile pour pouvoir offrir un peu de répit aux familles. Et le
Haut Conseil de la santé publique (HSCP) consulte pour voir s'il pourrait être envisageable de rouvrir certains accueils de jour. "Avec quels professionnels, quelle logistique de transport ? Il reste encore beaucoup de question à régler", estime Danièle Langloys. L'autre grande question qui mobilise le secteur associatif concerne les sorties. Une autorisation de sortie d'une heure, seul, un kilomètre de distance du domicile n'est pas du tout adaptée à bien des situations pour lesquelles des grandes balades dans la nature accompagnées restaient une excellente soupape de sécurité. L'Espagne a d'ailleurs autorisé ce type de sortie sur certificat médical. La délégation interministérielle à l'autisme a porté cette demande et le président de la République Emmanuel Macron annonce, ce 2 avril, un assouplissement des règles dans le message qu'il adresse aux personnes qui vivent avec l'autisme (lire notre article sur les modalités).

Les dispositifs de soutien à distance se multiplient. Autisme Info Service a doublé sa capacité de réponse (lire notre article) le 19 mars. Le 31 mars, le Groupement national des Cra (GNCRA) a ouvert un dispositif national d'écoute et d'accompagnement des personnes autistes adultes isolées. Il édite par ailleurs des fiches pratiques et alimente une foire aux questions. Ce 2 avril, les équipes du Cra Centre-Val-de-Loire ont décidé de célébrer la journée mondiale en lançant un grand mouvement d'applaudissement à midi pour célébrer les aidants familiaux, véritables héros de cette journée 2020.

Emmanuelle Deleplace

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