Offre de soins
Équité entre spécialités et coopération sont au cœur de la reprise de la chirurgie
Professeur à Strasbourg et président de l'Association française de chirurgie, Patrick Pessaux détaille les leçons locales à tirer pour affronter la deuxième vague liée à la reprise des activités de chirurgie, autour des coopérations public-privé.Après la première vague épidémique du Covid-19, les établissements de santé vont devoir en affronter une seconde, celle liée à la reprise des soins pour les activités non-Covid-19. Le Pr Patrick Pessaux, professeur des universités-praticien hospitalier aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS, Bas-Rhin) et président de l'Association française de chirurgie, livre les pistes locales et les enseignements nationaux pour accompagner ce nouveau défi dans une chronique mise en ligne sur le site du Laboratoire d'idées santé autonomie.
Le haut plateau d'activité des réanimations, sur lequel se trouve toujours les HUS et les autres établissements alsaciens, ne signifie donc pas la fin des défis qui les attendent. Au contraire, ils devront faire face aux impacts des restrictions sur les urgences non-Covid-19 et aux interruptions de soins des patients non-Covid-19 ainsi qu'à la hausse des souffrances et maladies psychiques (psychotraumatisme, burn out, etc.). En raison de leur pleine mobilisation, les hôpitaux publics seront les derniers à pouvoir se remettre en ordre de marche. "Les malades restent en moyenne trois semaines en réanimation et les unités ne seront pas désarmées avant la fin de l'été au plus tôt", souligne Patrick Pessaux. Les hôpitaux devront également se rééquiper pour assurer la continuité de tous les soins, tandis que l'été induira une baisse d'activité et que les professionnels de santé seront "usés physiquement et psychologiquement".
Concernant la chirurgie oncologique, le président de l'Association française de chirurgie invite à la coopération entre public et privé et entre établissements de toutes tailles. Les HUS sont ainsi en train de travailler à des conventions pour réaliser des opérations dans des cliniques. C'est déjà le cas avec la clinique Saint-François d'Haguenau (Bas-Rhin, lire notre article). "C’est dans ces mêmes établissements que la pression de la prise en charge de patients Covid-19 se relâchera en premier et ils seront ainsi plus à même de continuer à assurer la reprise d’une partie des activités chirurgicales", précise Patrick Pessaux.
Le praticien s'interroge aussi sur la reprise de la chirurgie dans un CHU sur l'offre de soins et le partage des créneaux opératoires. "Pour certaines spécialités, l’offre de soins est limitée en dehors des centres spécialisés, comme en chirurgie pédiatrique, en chirurgie oncologique complexe, en chirurgie cardiaque, en neurochirurgie et en chirurgie de transplantation d’organe", rappelle-t-il. Il appelle à privilégier l'équité d'accès aux créneaux opératoires plutôt que de prioriser une activité au détriment d'une autre.
Le système de santé devra également répondre à la crainte, chez les patients, de se rendre dans lieux où sont accueillis des malades du Covid-19. Le maintien de la distanciation sociale va également induire une baisse d'activité pour les hôpitaux et clinique, mais également les cabinets de ville de tous les praticiens. "Les organisations vont en être grandement modifiées et le défi de la nécessaire coopération sera d’autant plus difficile à relever", considère Patrick Pessaux qui appelle au dialogue. Il appelle également à redéfinir les rôles des établissements en matière d'offre de chirurgie, avec une allocation des ressources cohérente. "L’hôpital allait mal avant cette crise et il ne faudra pas, dans les prochains mois, se focaliser uniquement sur les moyens (pas assez de lits de réanimation, pas assez de respirateurs, pas assez de ...). Les besoins de la prochaine crise sanitaire ne seront d’ailleurs pas nécessairement ceux révélés par la crise", prévient-il.
Diagnostics différés et soignants épuisés
Il met ainsi en garde contre "l’impact majeur sur l'hôpital de la réémergence des pathologies qui ont évolué dans l’ombre du Covid-19, lequel les a tenues à l'écart des structures de soins en raison du confinement et du désarmement des établissements de santé sur le versant des soins qualifiés de non-urgents". À son sens, la prolongation du confinement va différer de plusieurs mois certains diagnostics nécessitant un plateau technique et renforcer le renoncement aux soins. Trois phases vont aggraver ces constats, à savoir "une phase de sidération postcrise, une augmentation brutale de la demande et un appauvrissement de l'offre pendant les mois d’été, avec des soignants exténués, particulièrement dans les régions les plus sollicitées", poursuit-il. C'est le cas notamment de l'ensemble de l'ancienne région Alsace, où les établissements de santé ont fait face au plus gros foyer épidémique.Le haut plateau d'activité des réanimations, sur lequel se trouve toujours les HUS et les autres établissements alsaciens, ne signifie donc pas la fin des défis qui les attendent. Au contraire, ils devront faire face aux impacts des restrictions sur les urgences non-Covid-19 et aux interruptions de soins des patients non-Covid-19 ainsi qu'à la hausse des souffrances et maladies psychiques (psychotraumatisme, burn out, etc.). En raison de leur pleine mobilisation, les hôpitaux publics seront les derniers à pouvoir se remettre en ordre de marche. "Les malades restent en moyenne trois semaines en réanimation et les unités ne seront pas désarmées avant la fin de l'été au plus tôt", souligne Patrick Pessaux. Les hôpitaux devront également se rééquiper pour assurer la continuité de tous les soins, tandis que l'été induira une baisse d'activité et que les professionnels de santé seront "usés physiquement et psychologiquement".
Coopération public-privé sur la chirurgie
La priorité est désormais, à son sens, de réduire les liste d'attente des patients. Pour les chirurgies les plus complexes, avec un plateau technique spécifique ou une hospitalisation en post-réanimation, il invite à repousser les opérations ou adresser les patients à d'autres centres nationaux ne se trouvant pas dans une zone épidémique. "À chaque fois, la dimension éthique du soin doit être analysée de manière individualisée afin de limiter les risques de perte de chance pour le patient", avance-t-il.Concernant la chirurgie oncologique, le président de l'Association française de chirurgie invite à la coopération entre public et privé et entre établissements de toutes tailles. Les HUS sont ainsi en train de travailler à des conventions pour réaliser des opérations dans des cliniques. C'est déjà le cas avec la clinique Saint-François d'Haguenau (Bas-Rhin, lire notre article). "C’est dans ces mêmes établissements que la pression de la prise en charge de patients Covid-19 se relâchera en premier et ils seront ainsi plus à même de continuer à assurer la reprise d’une partie des activités chirurgicales", précise Patrick Pessaux.
Le praticien s'interroge aussi sur la reprise de la chirurgie dans un CHU sur l'offre de soins et le partage des créneaux opératoires. "Pour certaines spécialités, l’offre de soins est limitée en dehors des centres spécialisés, comme en chirurgie pédiatrique, en chirurgie oncologique complexe, en chirurgie cardiaque, en neurochirurgie et en chirurgie de transplantation d’organe", rappelle-t-il. Il appelle à privilégier l'équité d'accès aux créneaux opératoires plutôt que de prioriser une activité au détriment d'une autre.
Maintien d'une gouvernance partagée
Pour réussir cette reprise d'activité, il invite tout d'abord les directions à prendre le relai sur la construction des collaborations public-privé, qui se sont faites à l'initiative des soignants dans le Bas-Rhin. "Il faut en appeler à une décision politique forte de mise en commun des plateaux techniques non-covid-19, comme cela a été fait pour organiser l'accueil des patients infectés. Il faut un moratoire incluant les modalités assurantielles de prise en charge et la circulation des praticiens", précise-t-il. Cela nécessite la poursuite d'une gouvernance partagée et transparente sur la stratégie de sortie de crise.Le système de santé devra également répondre à la crainte, chez les patients, de se rendre dans lieux où sont accueillis des malades du Covid-19. Le maintien de la distanciation sociale va également induire une baisse d'activité pour les hôpitaux et clinique, mais également les cabinets de ville de tous les praticiens. "Les organisations vont en être grandement modifiées et le défi de la nécessaire coopération sera d’autant plus difficile à relever", considère Patrick Pessaux qui appelle au dialogue. Il appelle également à redéfinir les rôles des établissements en matière d'offre de chirurgie, avec une allocation des ressources cohérente. "L’hôpital allait mal avant cette crise et il ne faudra pas, dans les prochains mois, se focaliser uniquement sur les moyens (pas assez de lits de réanimation, pas assez de respirateurs, pas assez de ...). Les besoins de la prochaine crise sanitaire ne seront d’ailleurs pas nécessairement ceux révélés par la crise", prévient-il.