Ressources humaines
La clarification du statut des praticiens à diplôme hors UE est annoncée et attendue pour 2018
Le 17 octobre, questionnée par le Parlement, la ministre des Solidarités et de la Santé affirmait l'amorce imminente d'un travail d'accompagnement des praticiens à diplôme hors Union européenne et des mesures prises dès 2018 pour instaurer un système pérenne d'autorisation d'exercice. Du côté des professionnels, les attentes restent fortes.
C'est "un vrai sujet" estimait Agnès Buzyn le 17 octobre dernier, dans le cadre du débat sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS, lire notre article). Interrogée sur les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), la ministre des Solidarités et de la Santé — consciente du rôle de ces professionnels dans le fonctionnement des établissements — était formelle : "Je dois [...] m'assurer qu'ils fournissent la qualité des soins optimales à nos concitoyens", avait-elle souligné. L'objectif pour Agnès Buzyn ? "Veiller à accompagner ces professionnels en termes éventuellement de formation, d'ouverture de places au concours, notamment pour des spécialités qui sont très déficitaires aujourd'hui." Et la ministre d'annoncer un travail imminent pour accompagner au mieux ces professionnels avec des mesures prises dès 2018.
"Nous faisons tourner les services qui ont du mal à recruter", confirme le Dr Samia Laoufi, ORL en Île-de-France et membre du Syndicat national des Padhue (SNPadhue). Diplômée en Algérie, la professionnelle a "raté" le dernier concours, se classant à la quatrième place pour trois postes, avec une moyenne de 18/20. "Voilà les notes pour lesquelles on nous refuse l'exercice...", regrette-t-elle. Ce que dénoncent Samia Laoufi et son syndicat, c'est aussi une certaine "inégalité" de traitement entre professionnels en raison de l'origine de leurs diplômes, malgré, dans les faits, une égalité de responsabilité. "Nous travaillons, nous sommes impliqués, nous formons des internes, mais nous ne serions pas capables d'exercer ?", interroge-t-elle, évoquant par ailleurs un niveau de rémunération inférieur aux autres praticiens.
Alors, depuis plusieurs années déjà, ces professionnels tentent de faire entendre leur voix. Le SNPadhue a notamment manifesté, le 14 novembre dernier, devant le ministère en charge de la Santé, pour dénoncer "cette situation de précarité professionnelle et sociale résultant des difficultés que rencontrent ces praticiens pour la reconnaissance de leurs diplômes, alors qu'ils exercent dans les hôpitaux de la République comblant ainsi le manque de médecins dont souffrent de nombreuses régions françaises". Car derrière la situation de chaque Padhue se cache en fait la problématique plus large de la démographie médicale.
Une esquisse de concertation, qui devrait officiellement être lancée au premier trimestre 2018. Pour l'heure, la DGOS confirme que la démographie médicale sera bien un élément à prendre en compte. Un paramètre nécessaire, mais pas suffisant : elle a réaffirmé auprès d'Hospimedia, ce 27 novembre, une volonté de légiférer sur le sujet, pour permettre de s'assurer des compétences acquises de chaque candidat au statut et d'instaurer un nouveau système qui s'inscrive dans la pérennité. Un impératif tant pour les Padhue eux-mêmes que pour l'ensemble du système de soins.
Le couperet du 31 décembre 2018
Il y a en effet urgence : le 31 décembre 2018 prendra fin le délai supplémentaire accordé au Padhue pour obtenir leur autorisation d'exercice, celle délivrée dans le cadre de la "liste C". Cette liste est l'une des trois voies d'entrée dans le statut avec le concours (liste A, qui est aujourd'hui la norme) et le statut particulier de réfugié politique (liste B). La loi relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme, du 1er février 2012, devait permettre aux Padhue recrutés avant le 3 août 2010 de continuer à exercer dans les établissements de santé publics et privés d'intérêt collectif (Espic) jusqu'au 31 décembre 2016. Elle créait ainsi une procédure dérogatoire d'autorisation d'exercice via un examen pouvant être tenté jusqu'à trois fois. Une possibilité mise en place pour permettre aux milliers de professionnels, installés durablement pour la plupart, de régulariser leur situation, en leur "offrant" un statut d'associé. Cette mesure a ensuite était prolongée dans le cadre d'un amendement à la loi Montagne, du 22 décembre 2016, qui recule la date butoir au 31 décembre 2018, le temps de légiférer à nouveau sur ce statut."Les Padhues sont qualifiés, ils sont diplômés et s'ils exercent à l'hôpital, c'est aussi qu'ils ont les compétences requises."Contactée par Hospimedia, la DGOS l'assure : la liste C a permis de délivrer plusieurs milliers d'autorisations. Mais un an avant l'échéance, les syndicats de Padhue estiment qu'environ 500 médecins se trouvent encore dans l'impasse, sans qu'aucune loi ne statue encore sur leur cas. "Il est difficile d'avancer des chiffres précis, car ces médecins officient selon des statuts très différents. Certains font fonction d'internes, d'attachés, d'assistants, d'autres sont contractuels", détaille le Dr Patricio Trujillo, président de la Fédération des praticiens de santé (FPS). Une certitude toutefois : "Ces médecins sont qualifiés, ils sont diplômés et s'ils exercent à l'hôpital, c'est aussi qu'ils ont les compétences requises", poursuit Patricio Trujillo.
Dr Patricio Trujillo, président de la Fédération des praticiens de santé.
Un concours et peu de place
Quelles solutions alors pour les Padhue attendant leur autorisation d'exercice ? La voie du concours, affirme la DGOS. Ce concours est destiné aux professionnels qui sont en exercice dans leur pays, poursuit-elle, et est ouvert chaque année, avec des répartitions de postes en fonction des spécialités. En 2017, 500 postes ont ainsi été ouverts. Insuffisant répondent les syndicats. "C'est très peu de postes, et selon votre spécialité, vous n'avez parfois aucun poste à pourvoir", confie Patricio Trujillo, qui estime qu'il faudrait environ 1 000 postes annuels à pourvoir. "Nous ne pouvons pas nous permettre de nous passer de médecins compétents déjà formés et exerçant depuis 2000", s'indignait la FPS dans un communiqué mi-novembre. La fédération prône une intégration "par la qualité et l'excellence", insiste son président."Nous faisons tourner les services qui ont du mal à recruter", confirme le Dr Samia Laoufi, ORL en Île-de-France et membre du Syndicat national des Padhue (SNPadhue). Diplômée en Algérie, la professionnelle a "raté" le dernier concours, se classant à la quatrième place pour trois postes, avec une moyenne de 18/20. "Voilà les notes pour lesquelles on nous refuse l'exercice...", regrette-t-elle. Ce que dénoncent Samia Laoufi et son syndicat, c'est aussi une certaine "inégalité" de traitement entre professionnels en raison de l'origine de leurs diplômes, malgré, dans les faits, une égalité de responsabilité. "Nous travaillons, nous sommes impliqués, nous formons des internes, mais nous ne serions pas capables d'exercer ?", interroge-t-elle, évoquant par ailleurs un niveau de rémunération inférieur aux autres praticiens.
L'enjeu de la démographie médicale
Au-delà des 500 praticiens concernés par la liste C, la FPS aussi dénonce la précarité dans laquelle se trouve une grande partie de ces professionnels. Selon la fédération, les médecins Padhue représentent environ 10% de l'effectif national de praticiens. Depuis 1999, près de 11 000 personnes ont pu bénéficier de ce statut, estime-t-elle, arguant également qu'aujourd'hui 3 000 d'entre eux se trouvent dans une situation précaire.Alors, depuis plusieurs années déjà, ces professionnels tentent de faire entendre leur voix. Le SNPadhue a notamment manifesté, le 14 novembre dernier, devant le ministère en charge de la Santé, pour dénoncer "cette situation de précarité professionnelle et sociale résultant des difficultés que rencontrent ces praticiens pour la reconnaissance de leurs diplômes, alors qu'ils exercent dans les hôpitaux de la République comblant ainsi le manque de médecins dont souffrent de nombreuses régions françaises". Car derrière la situation de chaque Padhue se cache en fait la problématique plus large de la démographie médicale.
"Nous occupons des postes, c'est vrai. Mais nous occupons surtout des postes qui ne seraient de toute façon pas pourvus.""En 2020, 30% des effectifs de praticiens hospitaliers partiront à la retraite. Cela en sachant qu'il existe aujourd'hui 4 500 postes vacants. Ce n'est pas une hausse du numerus clausus, qui n'a pas d'effet immédiat, qui sera la réponse à cette pénurie...", illustre Patricio Trujillo. Les Padhue, professionnels diplômés, qualifiés et en exercice, seraient-ils la solution à cette pénurie ? "Nous occupons des postes, c'est vrai. Mais nous occupons surtout des postes qui ne seraient de toute façon pas pourvus", argumente Samia Laoufi. Une position que le SNPadhue a pu expliquer à la DGOS lors d'une entrevue, le 14 novembre dernier, dans le cadre de sa mobilisation. La FPS a également demandé un entretien, après avoir consacré une table ronde sur cette problématique lors de son dernier congrès national, le 18 novembre. Cette entrevue est fixée au 8 décembre.
Dr Samia Laoufi, ORL et membre du Syndicat national des Padhue
Une esquisse de concertation, qui devrait officiellement être lancée au premier trimestre 2018. Pour l'heure, la DGOS confirme que la démographie médicale sera bien un élément à prendre en compte. Un paramètre nécessaire, mais pas suffisant : elle a réaffirmé auprès d'Hospimedia, ce 27 novembre, une volonté de légiférer sur le sujet, pour permettre de s'assurer des compétences acquises de chaque candidat au statut et d'instaurer un nouveau système qui s'inscrive dans la pérennité. Un impératif tant pour les Padhue eux-mêmes que pour l'ensemble du système de soins.